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Odépart
19
juin

Deux jours à Tanger

Tanger, la ville du détroit, salue l'Europe par-delà la mer et l'invite à venir voir son continent. Son appel a été entendu ! Il y a tant à faire à Tanger qu'un week-end parait bien peu, même quand il est bien rempli !

Le bord de mer

Arrivé en ferry en milieu de matinée, la descente est facilitée pour les piétons, et les voitures rivalisent de marche arrière pour se dépêtrer du navire ! La baie de Tanger est d'un charme incroyable, les collines verdoyantes au loin domine la medina et sa forteresse.

Situé en bord de mer, le café Hafa, accroché à sa falaise, donne une vue imprenable sur les côtes espagnoles. Le charme de l'endroit, tout comme son mobilier, est d'un autre temps : pourtant mythique (il a accueilli, entre autres, les Beatles et Jimi Hendrix), il n'a pas cédé aux lois de l'esthétisme moderne. Les petites terrasses, accessibles par un escalier aux marches inégales, proposent de simples chaises en plastique et des tables en fer que le temps n'a pas épargné. L'horloge semble s'y arrêter, des habitués sirotent leur thé à la menthe en jouant aux échecs.

Quant à moi, l'appétit me tiraille déjà et je m'accorde une bissera (soupe aux pois chiches, huile d'olive et cumin) en guise de petit déjeuner !

Le Grand Socco

Ce premier jour sera consacré à la ville, et nous nous enfonçons sur une grande place qui accueille un marché permanent au cœur de la cité (le Grand Socco). Les sens se réveillent alors !

La vue d'abord, avec les couleurs chatoyantes des costumes traditionnels des commerçants et des tissus proposés, puis l'ouïe : l'animation vous remplit d'énergie, entre les cris, les rires et les chants des vendeurs qui se mêlent soudain aux sifflements du serpent d'un charmeur. Les fruits et les épices prennent le relai pour les sensations olfactives et gustatives. Une entrée qui donne faim !

Nous opterons pour un restaurant qui surplombe le marché et profite de son ambiance, Les Passagers de Tanger. Le cadre est original, dans les tons taupes, où les ustensiles de cuisine deviennent des luminaires.
Les plats mixent la culture andalouse, méditerranéenne et marocaine à l'image de ce succulent repas composé de sardines à la chermoula, de cacahuètes grillées, de supions et de tartines de jambon de Pate Negra.

La médina

La place du 9 avril 1947, sur laquelle continue le tumulte du Grand Socco, est dominée par la mosqué Sidi Bouabid et son minaret de faïence aux multiples couleurs. La Cinémathèque, neuve et impressionnante, contraste avec le théâtre Cervantes, en ruine, croisé plus tard (en rentrant à l'hôtel).

Un dernier petit coup d’œil à cette place si animée, avec sa grande fontaine et ses palmiers, et nous nous orientons vers les jardins de la Mendoubia.

L'espace vert est un endroit idéal pour une balade digestive parmi des arbres plusieurs fois centenaires. Nous progressons donc parmi des figuiers, un vieux dragonnier mais aussi une collection de canons de bronze : ces jardins juxtaposaient autrefois le palais d'un représentant du sultan, devenu tribunal aujourd'hui.
Retour en arrière et nous entrons dans la médina, la vieille ville aux murs défraîchis et colorés.

Certaines bâtisses ont d'étonnantes architecture, et le plâtre se mêle alors au fer forgé, les fenêtres surplombent de jolis balcons d'où les gens observent la vie qui pullule dans les rues étroites.

Le Petit Socco se présente à nous, l'odeur du thé à la menthe nous revient des terrasses où l'on joue au backgammon au rythme hypnotisant d'instruments à vent et à corde que manient avec brio un groupe de musiciens à l'ombre d'un petit hôtel traditionnel. La vue sur le vieux port est magnifique, et de l'autre côté, on peut apercevoir les impressionnants remparts de la Kasbah.

La Kasbah

Point le plus haut de la médina, la forteresse donne une vue sur la baie qui donne envie de flâner sur le rempart pendant des heures ! Mais le séjour est court, et le programme copieux !

La cour intérieure est immense et on y imagine très bien le sultan accueillir autrefois avec fierté des dirigeants internationaux sur cette place impressionnante appelée le Grand Méchouar.

Beaucoup de monuments au sein de la Kasbah mériteraient de sérieux travaux de rénovation. La mosquée de la Kasbah en fait partie. A l'angle de deux remparts, elle en imposerait davantage si elle ne paraissait pas si vieillissante.

Elle ne manque toutefois pas de charme avec sa forme octogonale et sa mosaïque de faïences de couleurs chaudes.

On me l'avait conseillé : les tombeaux saâdiens et ses mausolées sont des endroits magnifiques, rien à voir avec le morbide de la plupart de nos cimetière. Les bâtiments s'articulent, comme pour les riads, autour d'un patio ensoleillé et agréablement fleurie de bougainvilliers et de roses.

Sous les palmiers dorment les serviteurs, quand les intérieurs luxueux abritent les sépultures du sultan Ahmed Al-Mansour et sa famille, baignant dans une atmosphère d'or pur et de décorations d'inspiration hispaniques et mauresques subtiles et minutieuses, parmi lesquelles se dressent douze colonnes de marbre.

Mais déjà la nuit tombe et la faim nous tiraille, nous nous gardons quelques monuments de la Kasbah pour le lendemain.

Matinée musées

Retour à la Kasbah, direction choisie : l'édifice le plus imposant de la place, j'ai nommé le palais du Sultan, Dar-El-Makhzen. Le bâtiment est splendide, avec ses grandes portes dorées et ses colonnes supportant des murs finement décorés qui se dressent fièrement face à quelques fontaines.

Le palais abrite deux musées : le plus grand, le Musée des Arts Marocains, permet d'y admirer, dans les anciens appartements des princes, des sculptures, poteries, bijoux et des tapis de soie. Le second musée vous plonge dans le passé et arborent des antiquités qui vont de mosaïques très anciennes aux statues de bronze romaines.

Un peu plus loin se dresse le Musée de la Légation Américaine, preuve historique que le Maroc a reconnu le premier l'indépendance des Etats-Unis.
Ce bâtiment représente donc la première propriété étrangère du gouvernement américain et retrace la chronologie des échanges entre les deux pays, à l'aide de cartographies d'époque, de lettres, de documents administratifs, mais aussi des peintures contemporaines.

Retour au bord de la mer, à l'anciennement nommé musée Forbes, du nom du milliardaire. On y expose plus d'une centaine de milliers de figurines de soldats de plomb reconstituant des grandes batailles, comme Waterloo ou Điện Biên Phủ, avec des effets lumineux et sonores très réussi.

De quoi revivre notre enfance de petit garçon et nous revoir, plus modestement, mener nos propres batailles avec nos bonhommes de plastique !

Vues sur la mer

Le détroit de Gibraltar peut être observé au Cap Malabata. On y voit très clairement la séparation entre l'océan Atlantique et la mer Méditerranée, passant d'un bleu azur à un bleu froid.

A une dizaine de bornes de Tanger, la marée vient rafraîchir périodiquement les grottes d'Hercule. Ces cavités calcaires naturelles font l'objet de visite guidée pour la moitié d'un euro. L'endroit, d'une beauté primaire empreinte de mythologie, serait celui où vint se reposer Hercule une fois avoir achevé ses douze travaux, observant certainement l'Espagne qui apparaît au loin.

A quelques pas, le cap Spartel est un point de vue idéal en fin de journée : le soleil se couche dans un océan rose pâle et les plantes embaument l'air ambiant. L'astre sera notre point final dans cette visite de Tanger, nous nous dirigeons vers la gare pour prendre notre train de nuit vers Marrakech. Mais cela est une autre histoire !

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